fin du poème

HYMNE  XIII  (T1)

POUR LE JOUR DES MORTS






Ecoute, Dieu puissant, le cri de ma douleur ;
Autour de moi la mort a déployé son ombre.
De nos inquiétés si tu comptais le nombre,
Qui pourrait soutenir le poids de ta fureur ?

     Ah ! suspends tes coups redoutables ;
     Contre des humains misérables
     Quelle haine peut t'inspirer !
     Voudrais-tu foudroyer l'argile
     Dont tu formas l'être fragile
     Que ton souffle fit respirer ?

Que l'homme est malheureux, que sa vie est cruelle !
Il naît comme la fleur, il est foulé comme elle ;
Ses maux sont mille fois plus nombreux que ses jours.
Il disparaît, semblable à la vapeur légère,
     Ou tel que l'ombre passagère,
Qui fuit au même instant qu'elle marque son cours.

        Je sais trop, Dieu terrible,
        Quels sont tous mes forfaits.
        Serez-vous inflexible,
        Vous qui nous avez faits !

Pourquoi cet appareil de guerre et de vengeance  ?
Nous ne vous fuyons pas, vous nous chargez de fers.
L'aquilon furieux craint-il la résistance
De la feuille qui tombe au retour des hivers ?

        Je sais trop, Dieu terrible,
        Quels sont tous mes forfaits.
        Serez-vous inflexible,
        Vous qui nous avez faits !

Hélas ! ouvrez l'oreille à mes soupirs funèbres,
Et laissez-moi jouir de la douce clarté.
     Assez tôt l'instant redouté
     Me plongera dans les ténèbres
     De la profonde éternité.

          O jour de colère,
          Terribles moments !
          O jour de misère,
          De pleurs, de tourments !

          La foudre dévore
          La terre et le ciel.
          Nous voyons éclore
          L'effroyable aurore
          Du jour éternel.

          O jour de colère,
          Terribles moments !
          O jour de misère,
          De pleurs, de tourments !

          Vengeur de nos crimes,
          Où fuir ? où cacher
          Les tristes victimes,
          Qu'au fond des abîmes
          Ta main va chercher ?

          O jour de colère,
          Terribles moments !
          O jour de misère,
          De pleurs, de tourments !

     Quels flancs proscrits m'ont donné l'être !
Quelle fatale main prit soin de me nourrir !
Dieu qui m'a condamné, pourquoi m'as-tu fait naître,
     Si je dois à jamais souffrir ?

        Non, le désespoir offense
        Un Dieu tendre et plein d'amour.
        Tout annonce sa clémence ;
        Il attend votre retour,
        Il diffère sa vengeance
Jusqu'au dernier instant de votre dernier jour.

Soit que l'astre des cieux rentré dans la carrière
        Recouvre sa splendeur ;
Soit que l'ombre des nuits nous cache sa lumière,
        Espérez au Seigneur.  (T2)

     Toujours sensible à votre hommage,
     Il est de son plus bel ouvrage
     Le consolateur, le soutien.
     Que pour lui seul tout mortel vive ;
     Et ne craignez pas qu'il proscrive
     Un sang racheté par le sien.

          Ames des fidèles,
          Reposez en paix.

        Que les portes éternelles
        Pour vous s'ouvrent à jamais.

          Ames des fidèles,
          Reposez en paix.

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TEXTE:
1. Dans 1751, c'est l'Hymne VIII.

2. Cette strophe remplace celle de 1751:

Soit que du ciel la plus brillante étoile
Du jour naissant ramène la splendeur,
Soit que la nuit vous couvre de son voile,
Ne cessez point d'espérer au Seigneur.

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